FRH 311
Printemps 2010
Pascale Barthe
Devoir 1
Le passage qui suit est extrait d’un livre intitulé Le tour de la France par deux enfants. Ce livre est paru pour la première fois en 1877. Pendant longtemps il a servi de manuel d’instruction civique pour les enfants des écoles primaires en France. Dans le livre, deux jeunes orphelins lorrains franchissent en cachette la frontière allemande et sillonnent les routes de France. Ils découvrent ainsi leur passé en même temps que leur pays.
Dans ce passage, c’est l’histoire de la Gaule qui est racontée aux enfants. Commentez l’orientation de cette présentation. En vous basant sur le texte, expliquez l’image de la Gaule qui ressort à la lecture. De quelle manière l’histoire de la Gaule est-elle racontée? Pouvez-vous émettre des hypothèses et tenter d’expliquer dans quel(s) but(s) cette histoire a été racontée de cette façon? Pensez à la période pendant laquelle ce texte a paru.
“Nos ancêtres, les Gaulois, étaient grands et robustes, avec une peau blanche comme le lait, des yeux bleus et de longs cheveux blonds ou roux qu’ils laissaient flotter sur leurs épaules.
Ils estimaient avant toutes choses le courage et la liberté. Ils se riaient de la mort, ils se paraient pour le combat comme pour une fête.
Leurs femmes, les Gauloises, nos mères dans le passé, ne leur cédaient en rien pour le courage. Elles suivaient leurs époux à la guerre; des chariots traînaient les enfants et les bagages; d’énormes chiens féroces escortaient les chars.
…
L’histoire de ce qui s’est passé en ce temps-là dans la Gaule, notre patrie, est émouvante.
Il y a bientôt deux mille ans, un grand général romain, Jules César, qui aurait voulu avoir le monde entier sous sa domination, résolut de conquérir la Gaule.
Nos pères se défendirent vaillamment, si vaillamment que les armées de César, composées des meilleurs soldats du monde, furent sept ans avant de soumettre notre patrie.
Mais enfin la Gaule, couverte du sang de ses enfants, épuisée par la misère, se rendit.
Un jeune Gaulois, né dans l’Auvergne, résolut alors de chasser les Romains de la patrie.
Il parla si éloquemment de son projet à ses compagnons que tous jurèrent de mourir plutôt que de subir le joug romain. En même temps, ils mirent à leur tête le jeune guerrier et lui donnèrent le titre de Vercingétorix, qui veut dire chef.
Bientôt Vercingétorix envoya en secret, dans toutes les parties de la Gaule, des hommes charges d’exciter les Gaulois à se soulever. On se réunissait la nuit sous l’ombre impénétrable des grandes forêts, auprès des énormes pierres qui servaient d’autels: on parlait de la liberté, on parlait de la patrie, et l’on promettait de donner sa vie pour elle.
…
Au jour désigné d’avance, la Gaule entière se souleva d’un seul coup, et ce fut un réveil si terrible que, sur plusieurs points, les légions romaines furent exterminées.
César, qui se préparait alors à quitter la Gaule, fut force de revenir en toute hâte, pour combattre Vercingétorix et les Gaulois révoltés. Mais Vercingétorix vainquit César à Gergovie.
…
Six mois Durant, Vercingétorix tint tête à César, tantôt vainqueur, tantôt vaincu.
Enfin César réussit à enfermer Vercingétorix dans la ville d’Alésia, où celui-ci s’était retire avec soixante mille homes.
Alésia, assiégée et cernée par les Romains, comme notre grand Paris l’a été de nos jours par les Prussiens, ne tarda pas à ressentir les horreurs de la famine.
…
La ville, où les habitants mouraient de faim, songeait à la nécessité de se rendre, lorsqu’une armée de secours venue de tous les autres points de la Gaule se présenta sous les murs d’Alésia.
Une grande bataille eut lieu; les Gaulois furent d’abord vainqueurs, et César, pour exciter ses troupes, dut combattre en personne. On le reconnaissait à travers la mêlée à la pourpre de son vêtement. Les Romains reprirent l’avantage; ils enveloppèrent l’armée gauloise. Ce fut un désastre épouvantable.
Dans la nuit qui suivit cette funeste journée, Vercingétorix, voyant la cause de la patrie perdue, prit une résolution sublime. Pour sauver la vie de ses frères d’armes, il songea à donner la sienne. Il savait combine César le haïssait; il savait que plus d’une fois, dès le commencement de la guerre, César avait cherché à se faire livrer Vercingétorix par ses compagnons d’armes, promettant à ce prix de pardonner aux révoltés. Le noble Cœur de Vercingétorix n’hésita point: il résolut de se livrer lui-même.
Au matin, il rassembla le conseil de la ville et y annonça ce qu’il avait résolu. On envoya des parlementaires porter ses propositions à César. Alors, se parant pour son sacrifice héroïque comme pour une fête, revêtu de sa plus riche armure, monta sur son cheval de bataille. Il fit ouvrir les portes de la ville, puis s’élança au galop jusqu’à la tente de César.
Arrivé en face de son ennemi, il arête tout d’un coup son cheval, d’un bond sauté à terre, jette aux pieds du vainqueur ses armes étincelantes d’or, et fièrement, sans un seul mot, il attend immobile qu’on le charge de chaînes.
Vercingétorix avait un beau et noble visage; sa taille superbe, son attitude altière, sa jeunesse produisirent un moment d’émotion dans le camp de César. Mais celui-ci, insensible au dévouement du jeune chef, le fit enchaîner, le traîna derrière son char de triomphe en rentrant à Rome, et enfin le jeta dans un cachot.
Six ans Vercingétorix languit à Rome dans ce cachot noir et infect. Puis César, comme s’il redoutait encore son rival vaincu, le fit étrangler.
…
Enfants, réfléchissez en votre cœur, et demandez-vous lequel de ces deux hommes, dans cette lutte, fut le plus grand.
Laquelle voudriez-vous avoir en vous, de l’âme héroïque du jeune Gaulois, défenseur de vos ancêtres, ou de l’âme ambitieuse et insensible du conquérant romain?”